La responsabilité à l’égard des tiers : article 1382 et s. du Code civil

La jurisprudence considère par exemple que “la notion de trouble de voisinage ne peut être étendue au cas de communication d’un incendie entre immeubles voisins” et que la réparation d’un tel dommage est soumise aux dispositions de l’article 1384, alinéa 2, du Code civil(Cass. 3e civ., 15 nov. 1978 : Bull. civ. 1978, III, n° 345 ; D. 1979, inf. rap. p. 347, obs. C. Larroumet ; RTD civ. 1979, p. 802, obs. G. Durry ; RD imm. 1979, p. 306, obs. J.-L. Bergel). De même, les dommages subis par les voisins du fait de la ruine d’un immeuble échappent à la théorie des troubles de voisinage et relèvent des dispositions de l’article 1386 du Code civil (Cf. CA Amiens, 7 juill. 1949 : JCP G 1950, II, 5244 ; M.-C. Lambert-Piéri, article préc. n° 55 s. – Construction immobilière et dommages aux voisins, Économica 1982, préface Ph. Malinvaud, n° 200 s.).

Le promoteur, s’il est maître de l’ouvrage, peut être responsable à l’égard des tiers en application de l’article 1382 du Code civil, s’il a pris l’initiative d’une construction irrégulière et dommageable pour les tiers, ou s’il a commis une faute en faisant ou en laissant édifier un bâtiment matériellement dommageable (CA Aix-en-Provence, 3e ch. civ., 2 mars 2002 : Juris-Data n° 2002-184634).

L’édification d’un bâtiment en infraction à la réglementation du permis de construire, si elle ne suffit pas à fonder une action en démolition de la part des tiers qui ne peuvent se prévaloir de dispositions strictement d’intérêt général, constitue cependant une faute qui justifie la responsabilité civile du promoteur dans la mesure où elle engendre un préjudice à l’égard des demandeurs.

La méconnaissance des servitudes d’urbanisme autorise les tiers qui en subissent un préjudice à demander la démolition des ouvrages irréguliers, mais elle constitue également une faute génératrice de responsabilité, sous réserve des conditions posées par l’article L. 480-13 du Code de l’urbanisme (Cass. 3e civ., 22 nov. 1983 : Bull. civ. 1983, III, n° 238. – Cass. 3e civ., 31 janv. 1984 : D. 1984, inf. rap. p. 191 ; RD imm. 1984, p. 286, obs. J.-L. Bergel).

Les dommages causés par une construction défectueuse aux immeubles voisins entraînent aussi la responsabilité du promoteur, maître de l’ouvrage, s’il a eu connaissance des risques qu’elle comportait pour eux et s’il n’a pas mis en oeuvre tous les procédés de nature à les éviter ou pris les précautions nécessaires (Cass. 3e civ., 27 mars 1973 : Bull. civ. 1973, III, n° 23, dommages dus au raccordement à l’égout public. – Cass. 3e civ., 5 janv. 1973 : Bull. civ. 1973, III, n° 27, insuffisance des travaux de sécurité. – Cass. 3e civ., 4 févr. 1976 : Bull. civ. 1976, III, n° 51, creusement d’une tranchée. – Cass. 3e civ., 12 juill. 1976 : Bull. civ. 1976, III, n° 316, absence de précautions pour démolir un mur de soutènement. – CA Paris, 19e ch. A, 11 oct. 1988 : Juris-Data n° 1988-025146 : connaissance des risques d’inondation et absence de prise de mesures préventives).

La connaissance du risque et des insuffisances des travaux résulte à l’évidence de la “compétence notoire” du promoteur et de son immixtion dans les travaux. Elle est aisément déduite par la jurisprudence de la profession du maître de l’ouvrage (Cass. 1re civ., 6 juin 1962 : Bull. civ. 1962, I, n° 298. – Cass. 3e civ., 12 juill. 1976, préc.) voire de la simple vraisemblance que le maître de l’ouvrage ne pouvait ignorer les risques(Cass. 3e civ., 4 févr. 1976, préc.), du fait qu’il avait été informé des aléas de la construction (Cass. 3e civ., 8 juill. 1971 : Bull. civ. 1971, III, n° 448. – Cass. 3e civ., 5 janv. 1973, préc.) ou encore de l’identité de siège social et d’intérêt avec un coordinateur de travaux (CA Paris, 19e ch. A, 11 oct. 1988, préc.). Il en va ainsi lorsque l’acceptation délibérée des risques fait suite à une information complète et éclairée.

La responsabilité du promoteur à l’égard des tiers peut être fondée sur l’article 1384, alinéa 1er, du Code civil lorsqu’il détient la garde de l’immeuble, c’est-à-dire les pouvoirs d’usage, de direction et de contrôle de cet immeuble. Tel peut être le cas s’il en est propriétaire ou maître de l’ouvrage et également lorsqu’il n’est que maître d’œuvre.