Les contrats de type particulier

La diversité des techniques juridiques utilisées dans le domaine de la promotion immobilière a conduit à une diversification de contrats spécifiques, régis par des textes particuliers. Tel est le cas des différentes sociétés réglementées par la loi du 16 juillet 1971, de la vente d’immeubles à construire, du contrat de promotion immobilière. Le contrat de construction de maisons individuelles, soumis aux articles L. 231-1 et suivants et R. 231-1 et suivants du Code de la construction et de l’habitation, intermédiaire entre le contrat d’entreprise et le contrat de promotion immobilière, implique à la charge du constructeur une responsabilité des vices de construction identique à celle des locateurs d’ouvrage.

Cession de parts sociales ou actions

Les cessions de parts sociales ou actions envisagées ici sont celles des anciennes sociétés immobilières constituées sous le régime de la loi du 28 juin 1938 et celles des sociétés d’attribution régies par le titre II de la loi n° 71-579 du 16 juillet 1971 (CCH, art. L. 212-1 et s.). Dans les sociétés coopératives de construction constituées sous la forme de coopératives d’attribution, toute cession volontaire de droits sociaux entre vifs à titre onéreux est prohibée pendant l’opération de construction (CCH, art. L. 213-11, al. 7), ce qui est conforme à l’esprit non spéculatif de la coopération. Pour les sociétés d’attribution du titre II, on sait que lorsque l’opération relève du secteur du logement, au sens du Code de la construction et de l’habitation, c’est-à-dire, quand 10 % au moins de l’immeuble sont à usage d’habitation ou à usage professionnel et d’habitation, la société doit conclure un contrat de promotion immobilière ou en confier les opérations constitutives à son représentant légal ou statutaire (CCH, art. L. 212-10). La cession volontaire de parts ou actions à des tiers ne peut alors intervenir qu’à partir de la conclusion du contrat de promotion immobilière ou l’approbation de l’écrit équivalent, si les souscripteurs initiaux ont effectué des versements pour les études techniques et financières du programme et l’achat du terrain (CCH, art. L. 212-10).

Le juge décide que le vendeur de parts sociales d’une société de construction n’est pas tenu de la garantie des vices cachés, telle qu’elle est édictée par l’article 1641 du Code civil (Cass. 3e civ., 16 mai 1977 : Bull. civ. 1977, III, n° 206 ; JCP G 1979, II, 19074, note F. Monéger ; D. 1977, inf. rap. p. 444) ni, d’ailleurs de la conformité des travaux au devis descriptif (Cass. 3e civ., 11 janv. 1977 : Bull. civ. 1977, III, n° 10). Il décide également qu’en l’absence de subrogation, le cessionnaire de parts ne dispose d’aucune action contractuelle de droit commun contre l’architecte dont la responsabilité ne peut être recherchée par lui que sur le plan quasi-délictuel (Cass. 3e civ., 13 déc. 1989 : Bull. civ. 1989, III, n° 235).

Finalement, le cédant de parts ou actions d’une société de construction de la loi de 1938 ou d’une société d’attribution ne doit garantie que de l’existence des droits sociaux par lui cédés et non celle d’un vendeur d’appartement (TGI Grasse, 12 déc. 1969 : JCP G 1972, II, 17253, note Pétot-Fontaine. – CA Paris, 12 juill. 1972 : Gaz. Pal. 1972, 2, p. 674).
La jurisprudence est sur ce point très changeante.

La Cour de cassation, relevant “que la SCI n’a été qu’une technique de commercialisation, que la cession de ses parts n’a été qu’une forme juridique dénuée d’effets réels… puisque l’acte de cession entraînait partage immédiat et attribution des lots aux acheteurs et qu’enfin sous forme de cession de parts, il a été procédé à des ventes d’immeuble achevé”, a admis que les vendeurs étaient tenus de la garantie des vices cachés édictée par l’article 1641 du Code civil (Cass. 3e civ., 5 mai 1981 : Bull. civ. 1981, III, n° 90 ; RD imm. 1981, p. 385, obs. Groslière et Jestaz).

Il a été également admis qu’une SCI était elle-même directement tenue d’une certaine conformité par rapport au règlement de copropriété à l’égard de ses membres, associés originaires ou cessionnaires de parts, pour condamner “in solidum” la société de construction et le cédant de parts sociales pour inexécution de leurs obligations contractuelles (Cass. 3e civ., 17 mars 1981 : RD imm. 1982, obs. Groslière et Jestaz).
De même, rappelant que les associés d’une société d’attribution de la loi du 28 juin 1938 ont, avant partage, un droit personnel de jouissance attaché aux parts sociales, la 3e chambre civile en a déduit que “bien que la société demeure propriétaire de l’immeuble jusqu’au partage, les associés peuvent, en tant qu’attributaires en jouissance, exiger de la société une jouissance conforme à ce qui a été prévu dans l’état descriptif et obtenir des dommages-intérêts du fait de non-conformité des garages” (Cass. 3e civ., 7 juill. 1982 : Bull. civ. 1982, III, n° 173 ; D. 1982, inf. rap. p. 510 ).

La Cour d’appel d’Aix a jugé que “si une société immobilière d’attribution est tenue de garantir les propriétaires de parts ou d’actions contre les conséquences des désordres pouvant affecter les locaux dont ils sont attributaires en jouissance, cette obligation de garantir cesse lorsque les intéressés deviennent attributaires en propriété des mêmes locaux, dans la mesure où leur retrait ne peut être assimilé à une vente et opère simplement transfert à leur profit des droits et actions de la société” (CA Aix-en-Provence, 3e ch. civ., B, 28 févr. 1989, Stés Sud carrelage et SAI Résidence La Cadenelle c/ Sté Campenon Bernard Europe et autres, inédit).

Vente d’immeubles à construire

La loi du 3 janvier 1967 a instauré “une garantie des vices apparents” (C. civ., art. 1642-1 et 1648, al. 2).

D’autre part, elle a soumis le vendeur d’immeubles à construire à la garantie des vices cachés ou des malfaçons dont les architectes, entrepreneurs ou autres personnes liées au maître de l’ouvrage par un contrat de louage d’ouvrage étaient eux-mêmes tenus en application des articles 1792 et 2270 du Code civil (C. civ., art. 1646-1). Or, ce régime particulier est d’ordre public, l’article 12 de la loi du 3 janvier 1967 réputant non écrite toute clause contraire aux dispositions des articles 1642-1 et 1646-1 du Code civil. L’article 5 de la loi du 3 janvier 1967 étend d’ailleurs, sur ce point, le domaine d’application de la loi du 3 janvier 1967 puisque, “lorsque l’un quelconque des locaux composant un immeuble a été vendu à terme, ou en l’état futur d’achèvement, la vente après achèvement d’un local compris dans cet immeuble est assujettie aux dispositions de l’article 1646-1” (mais pas à celles de l’art. 1642-1).

Le législateur a donc calqué la garantie des vices cachés due par le vendeur d’immeubles à construire sur celle des architectes et des entrepreneurs ou autres locateurs d’ouvrage. Il y a là une logique certaine : le vendeur “joue en quelque sorte le rôle d’un organisme-relais entre les acquéreurs qui le connaissent seul, et les maîtres d’oeuvres, avec lesquels seul il traite : sa responsabilité pour vice de la chose ne peut donc être rationnellement que celle qui pèse sur ces derniers et contre lesquels d’ailleurs il se retournera lorsqu’il sera poursuivi”(R. Saint-Alary, La vente d’immeubles à construire et l’obligation de garantie à raison des vices de construction : JCP G 1968, I, 2146).

La garantie mise à la charge du vendeur d’immeubles à construire par les articles 1642-1 et 1646-1 du Code civil concerne les promoteurs, personnes physiques, les sociétés de vente (L. 16 juill. 1971, art. 1 à 4) ou même les coopératives de vente (L. 16 juill. 1971, art. 22) qui sont assimilées à des vendeurs professionnels et qui sont, effectivement, en pratique, des promoteurs de métiers. Il est donc indifférent de distinguer selon qu’ils sont de bonne ou de mauvaise foi (Ph. Malinvaud, La garantie des vices par le vendeur-promoteur de constructions immobilières : unité ou diversité : JCP G 1969, I, 2284, n° 16).

Le vendeur peut en outre, éviter la résolution du contrat ou la diminution du prix en s’obligeant à réparer le vice (C. civ., art. 1642-1 et 1646-1, al. 4).

Contrat de promotion immobilière

Le contrat de promotion immobilière défini par l’article 1831-1 du Code civil est peu utilisé.

La loi impose la conclusion d’un contrat de promotion immobilière dans un certain nombre de circonstances où les garanties qu’il comporte apparaissent indispensables. Tel est le cas quand une société d’attribution construit un immeuble à usage d’habitation au sens de l’article L. 242-1 du Code de la construction et de l’habitation ou pour les sociétés coopératives de construction dans lesquelles les droits des associés sont représentés par des parts ou des actions donnant vocation à l’attribution d’un lot par voie de partage.
Ces sociétés d’attribution et coopératives ont alors l’obligation soit de conclure un contrat de promotion immobilière, soit de confier les opérations constitutives de la promotion immobilière à leur représentant légal ou statutaire (V. supra n° 19) dont la responsabilité est appréciée conformément à l’article 1831-1 du Code civil.

Le contrat de promotion immobilière est alors conclu entre une société immobilière et le promoteur. Il peut aussi, outre les cas où il est obligatoire, intervenir entre une personne quelconque et un promoteur à condition que celui-ci ne procure pas le terrain à son client, car l’article 44 de la loi n° 71-579 du 16 juillet 1971 oblige alors dans la plupart des hypothèses, à conclure une vente d’immeubles à construire. Un particulier, désireux de faire construire un immeuble de rapport ou une villa, une société ordinaire en quête de locaux, peuvent parfaitement avoir recours à un contrat de promotion immobilière.

Le maître de l’ouvrage peut agir en responsabilité contractuelle contre les entrepreneurs qui sont en effet ses cocontractants, puisque le promoteur est au moins en droit un simple mandataire. Mais en pratique, la question est plutôt de savoir si le maître d’ouvrage peut attaquer directement le promoteur sans avoir épuisé les voies d’exécution contre l’entrepreneur, et même sans l’avoir fait préalablement condamner.
Lorsque “le promoteur s’engage à exécuter lui-même partie des opérations du programme, il est tenu, quant à ces opérations, des obligations d’un locateur d’ouvrage” (C. civ., art. 1831-1 in fine).